Alabama Monroe, un film de Felix Van Groeningen


Quelques notes d’une mélodie bluegrass, le son pur du banjo, l’harmonie de quatre voix. L’histoire est entamée. Cowboy solitaire des temps modernes, Didier aime l’Amérique, sa musique, le rêve qu’elle promet. Il rencontre Elise, une jeune femme couverte de tatouages, signatures de ses amours perdus qui segmentent son corps. De leur union fusionnelle, hâtive, presque trop rapide, naît une fille, Maybelle. Tous trois vivent en dehors de la société, dans un monde qui n’appartient qu’à eux. Cependant, la réalité rattrape Didier et Elise le jour où ils apprennent que Maybelle est atteinte d’un cancer et elle les frappe en plein cœur lorsque la mort emporte leur enfant. Malgré la gravité du sujet, Felix Van Groeningen évite le pathos. La chronologie éclatée du récit brise la dramaturgie et parvient à écarter l’ombre de la mort que le spectateur perçoit sans pour autant la ressentir. Dans ce film aux allures de tragédie grecque – d’ailleurs adapté de la pièce de théâtre The Broken Circle Breakdown -, la musique du groupe de Didier joue le rôle du chœur. Apparaissant aux moments où l’émotion devient insupportable, la musique insuffle de la beauté à la douleur qui dès lors, s’adoucit. S’il s’agit bel et bien d’un drame – le couple finit par se séparer et Elise par se suicider -, le film reste néanmoins une ode à la vie. Pour preuve, le nom de baptême que se choisit Elise, Alabama Monroe, et qu’elle se tatoue sur le corps avant de se donner la mort. Le geste ancestral du baptême signe alors une renaissance et transmet au spectateur la force de l’amour et la persévérance de la foi dans le malheur. 

 

Texte : Anna Bogdanoff

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